Mon hédonisme

Alangui dans un silence sans maux
J’admire les danses évanescentes,
Que – battu au rythme doux d’un vent chaud –
Offre l’andin en quelques valses lentes.

Alors qu’affleure les senteurs de parfum
Des fleurs de jasmin qu’effleure ma main ;
Moi, ici – cartésien reconverti –
Je pense que je ressens, donc je suis.

S’insinuent, du haut de cette dune de terre,
Dans mon crâne, les murmures d’idées subreptices :
Se pourrait-il, que sous cette lune entière,
Me parvienne la lueur d’un nouvel hédonisme ?

Sous le ciel, mille macules étincellent,
S’entremêlent, éphémères et éternelles.
Non, ni les Dieux d’en haut, ni les Rois d’en bas
N’ont, sur ces yeux éthérés, plus de droits que moi.

Nymphe

A l’heure ou les rêves s’étrennent
Meurent, pour sans cesse renaître,
Elle, sans aide, à seize ans à peine
Se perche sur seize centimètres.

D’un pas hardi elle marche
Vers le paradis et l’enfer,
Là où les réverbères crachent
Leur si lapidaires lumières.

Ses seins sont haut, son âme lasse,
Ses cils sont faux, ses lèvres criardes.
Elle ajuste sa jupe trop basse
Que d’injustes juges regardent.

Douce source sourde et froide
D’où sourde, sous un prude effroi,
L’envie brute d’un mâle roide,
D’être le prédateur et la proie.

Absurde vasque vespéral sans fond
Lèvres en gaine sur ses crocs soumis
Elle aspire en elle les pulsions
Qu’elle provoque et assouvit.

Ma mort

Le sais-tu ? Quand vicieuse, et pourtant péremptoire,
La mort, rieuse, lentement me viendra voir
Accueillant par un sentencieux silence rance
Mes supplications et autres débiles instances
Que mes cheveux, par le temps tous blancs ou tombés,
Se dresseront pourtant devant sa lame bombée,
Qu’enfin, le destin, d’un tacite assentiment,
Aura disjoint nos dix mains bien trop vitement,
J’aurai aux lèvres un sourire pourtant, pour vous des pensées,
Ainsi qu’en moi les souvenirs par vous dispensez.
Poli, je lui verserai dans un verre dépoli,
Sous ma lampe une lampée de Leffe Rubis.
Son couperet de mon cou près je lui dirai,
Que si l’on se désagrège au grès de nos regrets,
Je prends fin complet d’avoir vécu avec vous.
Elle me trouvera mièvre, ma bière mauvaise,
A raison, sans doute ! Qu’importe – lorsqu’à son aise
Sa lame anthracite entrera dans mon cou,
J’aurais aux lèvres un sourire, pour vous des pensées,
Ainsi qu’en moi les souvenirs par vous dispensez.

Jacadi

Château-fort
Affaibli
Coffre-mort
Mais, ami

Ma magie
Dans ce corps
Assagi
Danse encore !

Meurtrières
Sont des brèches
Pas des mères.

Les carreaux
Sont des flèches
Pas des mots.

Au loin,
J’entends :
Demain
M’attend.

Le train
Du temps
M’éteint,
Pourtant

J’existe !
En toi
Ma voix

Subsiste
T’appelle
Si frêle :

La
Vie
M’a
Pris

Ta-
Pi
La
Nuit

Je
Crée
Tes

Sèves
De
Rêves











Je pars

De ce hublot qui en douceur crépite,
J’observe le temps à l’humeur labile,
Tandis qu’à tous ceux qu’aujourd’hui je quitte,
J’adresse un flot de pensées volubiles.

Dans l’écrin de mon crâne – nos souvenirs.
Dans le creux de mon âme – vos regards.
Vous, qui seuls avez su me faire rire !
Que j’aime ! Comprendrez-vous pourquoi je pars ?

S’élèvent dans les airs mes ailes de fer.
Sans un dernier regard pour mon pays,
Je m’envole à l’abris de la bruine, Fière,
Loin de ce crachin qu’ici est ma vie.

Fantômes

Ils sont une nuque nue, sur laquelle tombe
Des rayons dardant de chevelure blonde ;
Ils sont des yeux de ciel desquels on décerne
Une pétulance ardente, et quelques cernes ;

Ils sont une fine démarche féline et fluide,
A l’effet entremêlé : brûlante et humide ;
Ils sont des fantômes enfantés par des rien,
Par la lueur vide d’un bougeoir d’étain éteint ;

Ils sont des corps creux et morts qu’aimer trop étreint,
Des ombres de toi dans les quais, métros et trains.
Ils sont ceux dans lesquels mon âme entière s’enlise,
Qui, habitant de mon crâne eux-même s’Elise.

Impermanence

Sous mes yeux, l’agonie d’une chute.
Dans un linceul noir de pourrissement
Une feuille – minuscule parachute -,
Volette seule, vers ses anciens amants.

La brise chuchotante la chahute :
Charriée en volutes sous l’emprise du vent
Elle achève trois trop courtes culbutes
Sur le charnier de ses amis d’antan.

L’écorce écorchée, me toise un tilleul.
Dans sa langue, avec tact, je le questionne :
Pourquoi vivre, quand d’un cycle de deuil

Les folles saisons frappent tes filleules ?
La feuillaison, me dit-il, suit l’automne,
Comme pour toi le bonheur suit les écueils.

Défaites

Tes victoires prostrées, tremblent sous ta peau
Prosternées, crèvent une à une face à bourreaux :
Tes Défaites, conquérantes, guillerettes, te trépanent,
Crissent affreusement dans la crasse acre de ton crâne,

Croquent cru de leurs crocs écrus ou mettent à pic,
Les têtes de tes victoires qui abdiquent.
Vicieuses, Elles salent le sol et souillent les corps
De celles, si belles, qui furent tes ” Encore ! “.

S’infiltrent dans tout ton cortex tels des insectes
Les sons de leurs trompettes, victorieuses et infectes
S’y délectent du règne de leurs Vérités,
Qu’Elles dégueulent de leurs lèvres malformées.

Elles sont subreptices, dégueulasses et rances,
Douces, t’assujettissent à de lasses errances.
D’écrous apathiques elles serrent les vices
Alors que – ne le vois-tu ? – par toi seules sévissent !